Un plan « qui ne peut pas réussir » et dont « la poursuite en l’état pose la question de la crédibilité de l’action publique ». Quatorze ans après son lancement, le programme Ecophyto de réduction des pesticides fait une nouvelle fois l’objet d’ un rapport à charge . Celui que viennent de rendre public, mercredi, l’Inspection générale des finances, le Conseil général de l’alimentation, de l’agriculture et des espaces ruraux (CGAEER) et le Conseil général de l’environnement et du développement durable (CGEDD).

Ces trois autorités avaient été missionnées par le gouvernement en juillet 2020 pour évaluer la valeur ajoutée apportée par ce programme et ses financements. Un dispositif dont l’enveloppe de 81 millions d’euros en 2019 est à rapprocher des 643 millions d’euros mobilisés par d’autres acteurs – Europe, agences de bassin, régions, etc. – pour modifier les pratiques culturales des exploitants (conversion au bio, mesures agro-environnementales, etc.).

Ecophyto, Ecophyto 2, Ecophyto 2 +…
Cette précision étant faite, les auteurs du rapport déplorent qu’en dépit des dispositifs d’accompagnement propres à Ecophyto (fermes Dephy, fermes « 30.000 ») pour réduire la consommation de pesticides des agriculteurs, le compte n’y soit toujours pas. Malgré le plan Ecophyto sous le quinquennat de Nicolas Sarkozy, puis un deuxième sous celui de François Hollande et un troisième en 2018, « la réduction quantitative de l’usage des PPP [produits phytopharmaceutiques] se fait attendre », rappellent-ils.

Le report de 2018 à 2025 de l’objectif d’une division par deux de cet usage n’y a rien fait. La France « ne rejoint pas la trajectoire » qu’elle s’est fixée, laquelle devait passer par une baisse de 25 % en 2020. Les quantités de pesticides vendues ont au contraire augmenté : de 34 % pour les fongicides sur la période 2016-2018 par rapport à 2009-2011, de 25 % pour les herbicides ou encore de 6 % pour les insecticides.

Défauts de fabrication
Une dérive mise au compte de certains défaut de fabrication d’Ecophyto. Le fait de raisonner en doses plutôt qu’en quantité brute pour mesurer les substances actives est plus pertinent. Mais cette méthode n’est pas parfaite. Le calcul donne un résultat « disponible uniquement au niveau national » et « ne permet donc pas un pilotage aux différentes échelles (régions, exploitations) », pointe le rapport.

Les services de l’Etat ne veillent pas suffisamment au grain quant à l’usage des PPP. « On ne peut que constater le caractère faiblement dissuasif du nombre et des suites données aux contrôles », déplore le rapport. La gouvernance d’Ecophyto, sous la triple tutelle des ministères de l’Agriculture, de la Transition écologique et de la Santé, « est incomplète et manque de visibilité ». Enfin, il manque « un réel chef de projet » pour piloter à l’échelle d’une année l’application d’Ecophyto.

Une réduction de la consommation des PPP n’en demeure pas moins possible. Pour remettre la France dans les clous, le rapport préconise de « définir une nouvelle trajectoire à dix ans de réduction des PPP cohérente avec la nouvelle politique agricole commune ». Celle-ci démarrant en 2023, il ne reste même plus un an pour s’y mettre.

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