Depuis l’acquisition en 2010 de Siri, devenu l’assistant vocal de l’iPhone, une véritable razzia s’opère sur les talents et start-up du « machine learning », cette technologie qui donne la capacité à un système informatique d’enrichir seul la compréhension qu’il a d’une masse d’informations. Logique : c’est pour les Gafa ( Google, Amazon, Facebook, Apple) et les sociétés de leur écosystème (IBM, Salesforce, LinkedIn…) la clef d’exploitation et de valorisation des montagnes de données qu’elles récoltent quotidiennement. Grâce à elle, Amazon ambitionne par exemple d’anticiper les désirs des consommateurs en les dispensant même de l’effort de réfléchir à ce qu’ils souhaitent mettre dans leur panier, tandis qu’Apple espère faire de ses smartphones des assistants aussi fluides que HAL, l’ordinateur du vaisseau de « 2001 : l’odyssée de l’espace ».

Problème : les chercheurs de qualité sont encore peu nombreux dans le domaine. En cette année 2013, une estimation recense moins d’une cinquantaine de bons experts issus des meilleures universités du secteur, comme Stanford ou le MIT. Et leur valeur explose. En rachetant pour 625 millions de dollars en 2014 le britannique DeepMind – la start-up qui a développé le programme informatique AlphaGo, vainqueur du champion du monde de jeu de go, – Google a payé chaque chercheur en « machine learning » (ils sont alors une douzaine dans l’entreprise) l’équivalent de 50 millions de dollars. Un record, par rapport aux développeurs, généralement estimés entre 1 et 2 millions de dollars.

Dans ce grand mercato, les investisseurs jouent les agents de premier ordre, faisant monter les premières enchères pour doper la cote. Près de 700 start-up opèrent dans l’intelligence artificielle, selon le recensement de référence de la Crunchbase. Plus de la moitié (380) investissent le segment du « machine learning ». Les autres s’intéressent aux agents conversationnels qui fluidifient la relation homme-machine (92 start-up), aux moteurs de recommandation (66), à la robotique (65), aux agents intelligents qui comprennent leur environnement et agissent en conséquence (28), à la traduction automatique (15), et enfin aux start-up gérant les solutions de perception (traitement du langage, vision artificielle, reconnaissance de vidéos, contrôle gestuel…).

Toutes profitent du nouvel âge d’or du capital-risque, mais plus particulièrement les start-up du « machine learning ». L’offensive des « venture capitalists » a commencé en 2009 et, depuis, le montant des investissements croît chaque année d’au moins 30 %. En 2013, ils atteignent quasiment 600 millions de dollars pour des start-up qui ont été créées entre 2006 et 2010.

Eclairés par cet avant-poste, les Gafa riches à milliards n’ont qu’à faire leurs courses. D’autant que les recrutements sont de plus en plus diffi­ciles. A coups de surenchères sur la fiche de paie et d’avantages en nature, les géants de la Silicon Valley débauchent à tour de bras sur la base de salaires qui peuvent dépasser le million de dollars par mois. Yann Le Cun, directeur de la recherche en intelligence artificielle chez Facebook depuis décembre 2013, reconnaissait par exemple dans une interview au « Journal du Net » avoir « débauché de nombreux talents chez Google ». Il a enrichi depuis ses laboratoires de New York, de San Francisco et de Paris d’une soixantaine de nouvelles recrues.

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