Tracfin, la cellule de renseignement de Bercy, s’inquiète de l’association des monnaies virtuelles avec des cartes prépayées qui permettent de convertir le bitcoin en espèces.

« Le bitcoin, c’est une triple bulle : spéculative, opaque, et criminelle ». Cette nouvelle alerte sur les monnaies virtuelles émane de Bruno Dalles, directeur de Tracfin, alors que la cellule de renseignement de Bercy vient de publier son dernier rapport sur les risques de blanchiment. La révolution en cours dans les services financiers suscite l’inquiétude de ce service chargé de traquer les flux financiers frauduleux. « On voit de plus en plus souvent des combinaisons de monnaies électroniques, virtuelles, et de cartes prépayées », indique son directeur.

Le rapport cite le cas d’un cybercriminel français interpellé en février 2016 par le service de lutte contre la criminalité numérique de la gendarmerie nationale. Il proposait à la vente sur le « darkweb » des numéros de cartes bancaires volées, contre paiement en bitcoin. Les recettes étaient déposées sur une carte bancaire dite « bitcoin to plastic » qui permet de convertir ces sommes en espèces. « Ces fonds étaient par la suite retirés en espèces à un distributeur automatique de billets ou dépensés pour l’achat de matériel informatique sur internet », indique le rapport.

Culture de la traçabilité

Un exemple parmi d’autres qui, pour Tracfin, rappelle « la nécessité de développer une culture de la traçabilité dans les « fintech » ». La cellule avait déjà signalé des risques concernant le « crowdfunding » ou les cagnottes sur internet.  La particularité du bitcoin est qu’il repose sur l’anonymat. « Le problème, c’est l’opacité des monnaies virtuelles, indique Bruno Dalles, qui en dénombre près de 850. On a déjà identifié leur utilisation dans le paiement de stupéfiants ou dans ces cyberattaques associées à des rançons payées en bitcoins. »

Le ministre de l’Action et des Comptes publics, Gérald Darmanin, a précisé que l’Etat surveillait l’utilisation du bitcoin et des autres monnaies virtuelles afin qu’elles ne soient « pas perverties » pour servir « à des financements de crime organisé, de terrorisme ou de blanchiment ». Il a indiqué que les plus-values générées sur des transactions en bitcoins devaient être déclarées au fisc, sans quoi « le redressement fiscal serait évidemment à la hauteur de la fraude. »

Pas de statut juridique clair

Cette lutte est d’autant plus difficile que  les monnaies virtuelles n’ont pas de statut juridique clair et qu’elles ne sont pas reconnues comme des instruments financiers. La France attend beaucoup de l’actualisation de la quatrième directive antiblanchiment, actuellement en discussion au niveau européen. Le projet de texte prévoit que les plateformes d’échange entre monnaies réelles et virtuelles soient contraintes de s’enregistrer ou d’obtenir un agrément.

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